mercredi 21 septembre 2016

L'influence de William

La littérature est une histoire de transmission. Souvent nous lisons parce qu'enfants nous avons vu nos parents lire. Et l'on écrit toujours parce qu'un jour, un ou plusieurs auteurs nous ont donné envie d'essayer à notre tour. Je ne crois pas en l'existence d'une littérature déliée de toute antériorité, coupée d'une histoire qui lui soit intimement rattachée. La littérature que l'on écrit aujourd'hui est une conséquence de celle que l'on a lue hier. Et ainsi, par cycles successifs, nous entretenons cette formidable puissance du travail de l'évocation depuis des siècles. 
Il est impossible d'écouter un écrivain ne pas souligner l'influence qu'un prédécesseur a eu pour son oeuvre, et ce n'est pas quelque chose de nouveau. De même un lecteur procède souvent par rapprochements pour découvrir l'univers d'un auteur aux thèmes, au style, à la musique similaire à un autre qu'il a apprécié.
Il y a environ une dizaine d'années j'ai découvert William Saroyan. Auteur américain d'origine arménienne qui a écrit de nombreuses pièces, nouvelles et des romans que quelques critiques et blogs consacrés à la littérature US rattachent au mouvement qui inspira la Beat Generation. Bon, en l'occurrence, on peut tout de même se demander ce qui n'a PAS inspiré Burroughs, Kerouac et Ginsberg tant ces beatniks des lettres semblent avoir condensé et cristallisé des milliers d'influences. 
Mais qu'importe, au début des années 2000 j'ai donc lu plusieurs romans de Saroyan publiés entre 1934 ("L'audacieux jeune homme au trapèze volant") et le milieu des années 40 ("Une comédie humaine", "Folie dans la famille" et "Echapée en roue libre"). J'y ai découvert un romancier à l'écriture douce amère, sensible et drôle, jamais tragique même dans les moments les plus poignants d'une fiction largement inspirée de sa vie de fils d'immigrants arméniens qui a été témoin de la grande dépression de 1930 et de la seconde guerre mondiale.
Je suis justement en train de lire un court roman de Saroyan, plus tardif (1957) au titre révélateur de "Papa tu es fou" et dont je parlerai très bientôt ici. En attendant je ne résiste pas au plaisir d'en extraire une citation pour poser le ton du livre et qui permet aussi de constater en une seule phrase combien Saroyan peut se rapprocher d'auteurs comme Brautigan, Fante et Bukowski.
"Je me suis levé de table et je me suis mis à danser la gigue : Papa a éclaté de rire, et j'aime l'entendre rire comme ça - comme un type qui écrit, qui a faim et qui est complètement fou."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire