lundi 17 juillet 2017

L'extrait du... 17 juillet


J'ai trouvé cet extrait d'une interview de l'immense Jim Harrison qui date de la première élection d'Obama. Je n'ai pas la date exacte ni la référence d'où elle a été tirée mais j'aime son ton, sa clairvoyance et sa simplicité. 
Je vais bientôt me plonger dans un nouveau pavé de cet auteur que j'aime énormément, à l'occasion de la lecture de "Dalva". Et je n'aurai de cesse que d'encourager tout le monde à lire et à relire Jim Harrison. Je vous dois d'ailleurs une chronique de l'extraordinaire "De Marquette à Veracruz" lu il y a quelques semaines. Il me faut juste trouver le temps de l'écrire avec le soin que mérite cet extraordinaire bouquin...
"Aux Etats-Unis, nous en sommes au point où chaque Américain intelligent a été contraint de devenir le proctologue de l'anus putrescent du capitalisme effréné. C'est assez désagréable, d'autant que notre gouvernement nous a complètement lâchés. Nous avons été violés par la classe de nos dirigeants, et toute la communauté financière a manifesté le même sens moral qu'un cartel de la drogue mexicain.
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George Bush, qui n'a jamais rien accompli sinon au service de sa propre classe, a commencé une guerre pour des raisons largement imaginaires, mais aussi en partie pour montrer à son père comment on s'y prend. C'est la crise oedipienne la plus coûteuse de tous les temps. Bush est sincèrement sidéré d'apprendre que les bombes intelligentes se révèlent à l'usage l'être beaucoup moins que les attentats à la voiture piégée. Même après Abou Ghraib, il s'étonne que le monde arabe ne nous aime pas. Bush et les autres escrocs de bas étage de notre gouvernement proposent 750 milliards de dollars pour renflouer la communauté financière, mais rien pour la sécurité sociale des enfants démunis.

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Bien sûr, je suis poète et romancier, mais pas économiste ni l'un de nos innombrables nababs des médias qui pensent apparemment que parler, c'est penser. J'ai aussi remarqué que les politiciens n'aiment pas la bonne cuisine, car ils passent un temps fou à chier par la bouche.

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Contrairement à la plupart d'entre nous autres, les proctologues amateurs, je ne reproche pas tout aux financiers et au Congrès. Je situe l'origine du désastre actuel dans notre système d'enseignement pourri et paresseux. Alors que je faisais des recherches pour écrire une longue nouvelle, j'ai récemment découvert qu'un pourcentage infime de nos étudiants, 10% au mieux, a une petite idée de l'endroit où ils se situent historiquement, géographiquement, géologiquement ou du point de vue de la botanique. Les adultes sont seulement des produits à peine améliorés du même système d'enseignement. Les gens âgés en savent davantage, car ils ont eu droit à un meilleur système. Les crétins étant incapables de reconnaître leurs semblables, ils ont voté deux fois pour George Bush et ses sbires. Les médias, pour la plupart méprisables, n'ont guère été d'une grande aide, car, jugeant la réalité tout à fait insupportable, ils font des pieds et des mains pour s'en tenir aux faits périphériques. Les médias en général se sont contentés de lécher les bottes des méprisables nouveaux riches qui, sans vergogne, nous dépouillaient de tout.

(...)
Vers quelles consolations pourrais-je donc me tourner en ces temps de détresse, sinon vers le côtes-du-rhône, avec un petit verre de vodka en prime, sans oublier un peu d'antique poésie chinoise chaque matin, où nous autres humains sommes toujours présentés comme les victimes de nos dirigeants ? Bizarrement, je ne me suis pas vraiment soucié d'avoir perdu une bonne partie de l'argent mis de côté pour ma retraite. L'insécurité ne me menace pas, car je ne me suis jamais senti en sécurité. Je pourrais toujours prendre ma retraite en allant au crématorium. Bonne chance à vous, camarades proctologues ! J'avoue avoir dernièrement beaucoup parlé à mes chiens. Les chiens comprennent le monde grâce au langage des odeurs et les miens m'ont déclaré qu'il régnait dans tout le pays une affreuse pestilence qu'il fallait éradiquer."


Jim Harrison

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